Histoire
Ren aurait pu avoir de la chance. Il aurait pu, seulement, mais il n’en a jamais eu. Etait-ce une punition parce qu’il était roux ? Parce que les roux étaient persécutés depuis la nuit des temps, parce que leurs cheveux n’étaient pas comme les autres. Encore aujourd’hui il se pose la question. Pourquoi tant de haine ? Pourquoi ne pouvait-il pas avoir droit à un passé normal, banal et sans intérêt ? Parce que quelqu’un en avait décidé ainsi. Ce quelqu’un, c’était la vie. Dès le début ça a été un véritable cauchemar.
Des origines floues, peut-être même pas japonaises, Ren n’en saura jamais rien. Il ne connaît pas sa famille biologique. Pourquoi ? A cause d’un accident. D’un accident de voiture qui pris la vie de sa famille. Lui aussi a bien failli y passer mais le ciel en avait décidé autrement. Les gens qu’il a vu plus tard et qu’il a pris pour ses parents ne l’étaient pas. Des imposteurs qui ont prit cet enfant avant de partir, ne laissant derrière eux que mort et désolation. Qui étaient ces gens ? Des scientifiques fous. Un homme sadique et sa femme tout aussi dérangée que lui. Ce couple qui aimaient pratiquer des expériences sur des enfants qui présentaient des caractéristiques singulières… Comme l’albinisme pour les cheveux… Les enfants handicapés. Quand ils s’en lassaient, ils les tuaient.
La femme, ou mère adoptive de Ren travaillait dans une maternité, il était donc facile pour elle de kidnapper un enfant et le ramener sans attirer l’attention. Elle était passée maître dans cet art. Elle s’était intéressée à cet enfant aux cheveux rouges, dès son arrivée à l’hôpital, elle avait remarqué ce duvet de cheveux sur sa tête, une tête rousse. Ren n’aura jamais connu sa véritable famille, et aura été élevé toute sa vie par ces monstres. Son enfance et son adolescence, il s’en souviendra pour le restant de ces jours.
Une identité qui n’était pas la sienne. Ren Nakagawa était son vrai patronyme. Qu’il avait cherché bien plus tard bien sûr. Cet enfant que les scientifiques tentaient d’éduquer avec leurs valeurs. Ils s’occupaient de lui, donc le tout petit rouquin n’avait pas à se plaindre… Mais tout bascula vers ses cinq ans.
Ce jour où ses ‘parents adoptifs’, comme cadeau d’anniversaire, l’avaient enfermé dans cette pièce toute blanche, médicale, pour lui prélever du sang et pour commencer les expériences. Au début Ren ne comprenait pas, il se débattait, il avait peur et n’aimait pas ça. On lui prélevait des petites quantités de sang au début, qui augmentèrent avec l’âge.
Ren était prisonnier de cet engrenage, il ne pouvait rien y faire. Il s’enfermait dans sa chambre avec le cœur au bord des lèvres à chaque fois. Tout ça le dégoûtait, il voulait partir, quitter cette maison mais ses parents ne le laissèrent jamais faire. Parfois ils lui laissaient le loisir de se faire de faux espoirs avant de le rattraper, et de lui faire payer sa fugue.
Lesdites fugues avaient commencé vers ses huit ans. Comment ils le punissaient quand ils le rattrapaient ? En le privant de nourriture pendant parfois plusieurs jours, en le frappant comme pouvait le faire le père et bien d’autres. Ils pouvaient être très créatifs quand il s’agissait de punir le rouquin. Lequel finissait par avoir peur de ce couple, une peur qui lui prenait les tripes. En même temps que ça, il développa une phobie, celle du sang. Quand il voyait son sang prélevé, ou par terre quand il crachait après s’être fait battre, il restait figé en le fixant, les larmes aux yeux. Ren ne pouvait plus voir du sang sinon il ne répondait plus, parce qu’il ne pouvait plus, simplement.
Le comportement changeant du rouquin amusait sérieusement les deux scientifiques qui prenaient un malin plaisir à torturer mentalement cet enfant qui n’avait pourtant rien demandé. Plus les années passaient, plus la santé physique et mentale de Ren se voyait fragilisée. Jamais ils ne le laissaient tranquille, ils trouvaient toujours quelque chose, et comme le garçon manquait souvent de sang et qu’il devait se reposer, il ne faisait rien d’autre que se reposer jusqu’à la fois d’après et ainsi de suite.
Ses ravisseurs, qu’il considérait ainsi, plus que des parents en tout cas, lui avaient quand même offert un ordinateur. A treize ans, Ren avait honte de dire qu’il savait à peine lire et qu’écrire pour lui c’était dur, puisqu’on ne lui avait jamais vraiment appris, les imposteurs ne prenant pas la peine de lui apprendre ça. Bien souvent le jeune garçon passait ses journées sur Internet à chater avec des gens sur des forums, à savoir écrire mieux, utilisant des correcteurs pour ne pas qu’on se doute de quelque chose. Le rouquin faisait tout pour être normal et avoir des amis lui aussi, même virtuellement.
Tous les jours il parlait avec la même personne sur un forum, tous les jours il pouvait s’évader un peu et quitter son quotidien qui lui prenait sa vie, littéralement. A force de traîner sur Internet, il appris beaucoup de choses, des choses que les scientifiques ne lui enseigneraient jamais, il se débrouillait seul. Ren comblait son manque d’apprentissage par l’intelligence et très vite il s’intéressa au fond de l’ordinateur, cherchant à en percer tous les secrets pour pouvoir toujours effacer ses traces et pour ne pas qu’on voit ce qu’il faisait. Ce serait problématique pour lui sinon.
Ce petit manège dura deux ans, jusqu’aux quinze ans de l’adolescent. Cela faisait deux ans qu’il parlait à son ami via Internet, qu’il s’était amélioré en orthographe, mais aussi en culture générale. Il connaissait son ordinateur par cœur et il ne s’était jamais fait prendre. Le rouquin était fier de sa performance malgré sa faiblesse de plus en plus grande.
Et puis le pire fini par arriver.
Un soir alors que Ren était épuisé, il s’était endormi sur son ordinateur alors qu’il discutait avec son ami et son ‘père adoptif’ l’avait vu. Il n’avait pas attendu le lendemain pour traîner le rouquin hors de sa chambre et lui faire payer ce qu’il avait fait, lui hurlant dessus. Le reste était flou pour lui, même encore aujourd’hui. Le soir-même, alors que le couple était parti dîner au restaurant, Ren était passé à l’action. Qu’est-ce qu’il avait fait ? Pendant plusieurs mois il avait préparé ce qu’il voulait faire.
Le rouquin de quinze ans savait que c’était du suicide, pourtant il l’avait fait. Le jeune garçon avait répandu du carburant partout dans la maison, jusqu’aux bouteilles de gaz. Puis il y avait mit le feu sans attendre que les goules reviennent. Quelque part il avait espéré partir, parce qu’il en avait marre de vivre. La maison a explosé avec le mélange du feu, du carburant et du gaz. Les scientifiques n’étaient pas revenus. Ren s’était mis à couvert mais avait été coincé sous les décombres brûlants qui lui avaient valu une très grosse brûlure dans le dos mais aussi au bras, et c’était des cicatrices qui étaient toujours visibles.
Les pompiers, la police, tout le monde avait été alerté par ce bruit, par cette scène peu commune. Le rouquin avait été retrouvé et emmené directement à l’hôpital. Son souhait de partir n’avait pas été exaucé. Ren était tombé dans le coma à cause de tout ça. A l’hôpital ils avaient pu le soigner, le mettre hors de danger, seulement il ne se réveillait pas. Le garçon s’était réveillé l’année d’après. Pendant douze mois, voire un peu plus il n’avait pas ouvert les yeux.
A son réveil il ne tarda pas à raconter ce qu’il s’était passé aux policiers, après quelques jours où il s’était remis de ses émotions. Quelque chose était nouveau pour lui, le fait qu’il soit libre. A seize ans seulement, il a été placé en famille d’accueil pour qu’on s’occupe de lui. Ren ne faisait absolument pas confiance à ces gens, il n’avait plus confiance en rien de toute façon. C’est à partir de ce moment-là qu’il se mit sérieusement au sport et à la musculation, même à l’auto-défense, pour pouvoir se défendre si besoin. Parce qu’il en avait marre d’être la victime, marre d’être sur celui qu’on tapait, il en avait marre de tout ça.
Sa famille d’accueil avait deux fils, plus âgés que Ren, qui voulait persécuter ce dernier parce que c’était amusant. Le rouquin n’avait pas hésité à les remettre en place et pas de la manière la plus douce qui soit, manquant d’en tuer un en lui brisant la nuque et l’autre étant parti rapidement à l’hôpital. Le jeune homme s’en fichait qu’on le détestait ou qu’on l’aimait, ce n’était pas ça qui allait l’empêcher de vivre seulement il ne voulait plus vivre avec des règles.
Le jeune roux le fit comprendre en fuguant un soir, à ses dix-sept ans. Il ne pouvait plus vivre avec les autres parce qu’il était trop méfiant. Il devint rapidement autonome, sans rejoindre le lycée pour autant. Ren préférait enchaîner les petits boulots. D’ailleurs il loua rapidement un studio qui devint rapidement le sien. Cette histoire ne dura pas loin d’un an et le jeune homme était légalement majeur, donc il pouvait faire ce qu’il voulait, il habitait désormais le quartier d’Ikebukuro.
Malgré ses dix-huit ans, Ren en faisait plus, la vingtaine bien tassée, et même un peu plus âgé. Il avait eu vent de la création de groupes de couleurs… Enfin surtout un, les Yellow Scarves. Comment il l’avait su ? Parce qu’il s’était déjà battu avec plusieurs d’entre eux alors qu’ils lui cherchaient des noises. Le rouquin n’avait pas hésité à les remettre en place. Les choses se passèrent très vite, le gang rival à ces jaunes ne tarda pas à se manifester, les Blues Squares, donc Ren pris la tête… Cela ne faisait pas longtemps que ça s’était passé mais il est clair qu’il ne lâchera pas le morceaux contre le gang rival.